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Confidences

Confidences

Confidences

A partir d''Evening summer" d'Edward Hopper via Wikimedia Commons

Inutile de préciser qu'on oublia les poneys. L'un suivant l'autre, et séparés par quelques pouces de pénombre, Tom et miss Baker émigrèrent vers la bibliothèque, pour je ne sais quelle veillée funèbre, tandis que jouant les invités ingambes et durs d'oreille, je traversai avec Daisy un dédale de vérandas communicantes, pour atteindre celle qui longeait notre façade. Il faisait presque nuit. Nous nous sommes assis, côte à côte, sur une banquette en rotin.
Daisy a pris son visage dans ses mains, comme pour en vérifier le charmant contour, et son regard s'est perdu peu à peu dans le velours du crépuscule. Je la sentais si bouleversée, que j'ai tenté de la calmer en lui posant quelques questions à propos de sa petite fille.
- Nick, nous nous connaissons à peine, m'a-t-elle dit brusquement. Nous sommes cousins pourtant. Tu n'es même pas venu à mon mariage.
- J'étais encore mobilisé.
- C'est juste.
Et, après une hésitation :
- J'ai vécu des moments très difficiles, Nick, et je suis devenue d'un cynisme absolu par rapport à tout.
Elle avait des raisons de l'être, de toute évidence. J'avais attendu, mais voyant qu'elle n'ajoutait rien, je suis revenu avec maladresse sur sa petite fille.
- Elle parle, elle mange et…et tout ça.
- Oui, oui.
Elle me regardait, l'air absent.
- Ecoute, Nick. J'ai envie de te répéter ce que j'ai dit à sa naissance. Tu veux savoir ce que j'ai dit ?
- Bien sûr.
- Tu comprendras mieux mes réactions par rapport à …à tout. Elle n'avait pas une heure. Tom était je ne sais où. En me réveillant de l'anesthésie, j'ai eu l'impression que la terre entière m'avait abandonnée. J'ai demandé à l'infirmière si c'était une fille ou un garçon. Elle m'a répondu : "Une fille". J'ai tourné la tête et je me suis mise à pleurer. "Parfait", ai-je dit, je suis contente que ce soit une fille. J'espère qu'elle sera idiote. Pour une fille, c'est la meilleure place à tenir sur terre - celle d'une ravissante idiote. "
Elle poursuivit d'un ton pénetré :
- De toute façon, je pense que tout est horrible. Tout le monde le pense - les gens les plus évolués. Et je sais. J'ai été partout, j'ai tout fait, j'ai tout vu.
Elle regarda autour d'elle avec une insolence hautaine, assez voisine de celle de Tom, et se mit un rire - un rire de mépris inquiétant.
- Snob ! …Dieu que je suis snob !
Au moment précis où sa voix s'éteignit sans plus chercher mon attention, ni vouloir me convaincre, j'ai su que rien de ce qu'elle avait dit n'était vrai. J'en ai ressenti un profond malaise, comme si la soirée tout entière n'avait été qu'un jeu d'illusionniste, destiné à me soutirer ma quote-part d'émotion. J'ai attendu pour être sûr de ne pas me tromper, et lorsqu'elle s'est tournée vers moi, il y avait sur son charmant visage une petite grimace d'ironie, confirmant qu'ils appartenaient, Tom et elle, à une franc-maçonnerie de très haut niveau, où la sélection est impitoyable.