Pérez

Et ainsi

Et ainsi, après cet échange de courtoisies qui brisèrent la glace, Buby et la Petite Souris Pérez devinrent les meilleurs amis du monde. On pouvait deviner que Pérez était une souris du monde, habituée à marcher sur les tapis et à fréquenter des gens distingués. Sa conversation était variée et instructive, et son érudition étonnante. Elle avait voyagé dans toutes les canalisations et tous les sous-sols de la Cour, et logé dans toutes les bibliothèques. Dans celle de l'Académie Royale d'histoire d'Espagne, elle avait mangé, en moins d'une semaine, trois manuscrits originaux.
La Souris parla aussi de sa famille qui n'était pas très nombreuse : deux filles en âge de se marier, Adélaïde et Elvire, et un fils adolescent, Adolphe, qui étudiait la diplomatie dans le tiroir même où le Ministre d'État gardait ses notes secrètes. De sa femme, Pérez parla peu, ce qui fit suspecter à Buby qu'il y avait là un mauvais mariage ou peut être des querelles conjugales.
Écoutant bouche bée tout cela, le Roi Buby tendait machinalement la main pour attraper la queue de la souris. Mais Pérez, avec une oscillation rapide et cérémonieuse, changeait sa queue de côté pour esquiver ainsi la tentative de l'enfant, sans manquer de respect au monarque. 
Il se faisait déjà tard, et comme le Roi Buby ne lui donnait pas congé, la Souris Pérez insinua, habilement, qu'elle devait encore se rendre cette nuit même au numéro 64 de la rue Jacometrezo pour aller chercher la dent d'un enfant très pauvre prénommé Gil. Le chemin était difficile et dangereux parce qu'il y avait dans le voisinage un chat très méchant qui s'appelait Gaiféroce.