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En ce moment

En ce moment

à partir d'une illustration de PG Jeanniot via Pontauchange.com

En ce moment, une goutte de cire tomba sur le doigt de Gavroche et le rappela aux réalités de la vie.
– Bigre ! dit-il, v’là la mèche qui s’use. Attention ! je ne peux pas mettre plus d’un sou par mois à mon éclairage. Quand on se couche, il faut dormir. Nous n’avons pas le temps de lire des romans de monsieur Paul de Kock. Avec ça que la lumière pourrait passer par les fentes de la porte cochère, et les cognes n’auraient qu’à voir.
– Et puis, observa timidement l’aîné qui seul osait causer avec Gavroche et lui donner la réplique, un fumeron pourrait tomber dans la paille, il faut prendre garde de brûler la maison.
– On ne dit pas brûler la maison, fit Gavroche, on dit riffauder le bocard.
L’orage redoublait. On entendait, à travers des roulements de tonnerre, l’averse battre le dos du colosse.
– Enfoncé, la pluie ! dit Gavroche. Ça m’amuse d’entendre couler la carafe le long des jambes de la maison. L’hiver est une bête ; il perd sa marchandise, il perd sa peine, il ne peut pas nous mouiller, et ça le fait bougonner, ce vieux porteur d’eau-là.
Cette allusion au tonnerre, dont Gavroche, en sa qualité de philosophe du dix-neuvième siècle, acceptait toutes les conséquences, fut suivie d’un large éclair, si éblouissant que quelque chose en entra par la crevasse dans le ventre de l’éléphant.
Presque en même temps la foudre gronda, et très furieusement. Les deux petits poussèrent un cri, et se soulevèrent si vivement que le treillage en fut presque écarté ; mais Gavroche tourna vers eux sa face hardie et profita du coup de tonnerre pour éclater de rire.
– Du calme, enfants. Ne bousculons pas l’édifice. Voilà du beau tonnerre, à la bonne heure ! Ce n’est pas là de la gnognotte d’éclair. Bravo le bon Dieu ! nom d’unch ! c’est presque aussi bien qu’à l’Ambigu. Cela dit, il refit l’ordre dans le treillage, poussa doucement les deux enfants sur le chevet du lit, pressa leurs genoux pour les bien étendre tout de leur long, et s’écria :
– Puisque le bon Dieu allume sa chandelle, je peux souffler la mienne. Les enfants, il faut dormir, mes jeunes humains. C’est très mauvais de ne pas dormir. Ça vous fait schlinguer du couloir, ou, comme on dit dans le grand monde, puer de la gueule. Entortillez-vous bien de la pelure ! je vas éteindre. Y êtes-vous ?
– Oui, murmura l’aîné, je suis bien. J’ai comme de la plume sous la tête.
– On ne dit pas la tête, cria Gavroche, on dit la tronche.
Les deux enfants se serrèrent l’un contre l’autre. Gavroche acheva de les arranger sur la natte et leur monta la couverture jusqu’aux oreilles, puis répéta pour la troisième fois l’injonction en langue hiératique :
– Pioncez !
Et il souffla le lumignon.